L'élection du président de la République au suffrage universel conforte la prééminence du chef de l’État, déjà grande du fait de la personnalité du général de Gaulle, tant au sein de l’exécutif qu’à l’égard du pouvoir législatif, qui n’est plus la seule institution représentant directement le peuple.
Le président de la République devient le représentant direct de la Nation, car il est élu directement par elle, alors que le Premier ministre en est que le représentant indirect. De plus, la légitimité du président de la République est désormais supérieure à celle des députés. Le chef de l’État est élu par l’ensemble des citoyens sur une circonscription unique, le territoire national, ce qui n’est pas le cas des députés élus dans le cadre de circonscriptions limitées.
Elle renforce la position subordonnée du Premier ministre par rapport au président de la République. L’usage a consacré le principe de la responsabilité du Premier ministre devant le Président, puisque le chef du Gouvernement est désigné par lui. Le chef de l’État a exigé à plusieurs reprises la démission du Gouvernement sans que l’Assemblée nationale ait pour autant adopté de motion de censure. C’est le cas lors des démissions de Michel Debré en avril 1962, de Jacques Chaban-Delmas en juillet 1972, de Pierre Mauroy en juillet 1984, de Michel Rocard en mai 1991 et d’Édith Cresson en mars 1992.
La Ve République présente ainsi l’originalité d’un exécutif bicéphale, une dyarchie – terme que récusait le général de Gaulle – que Jean Massot qualifie de hiérarchisée. Cette hiérarchie au profit du Président, hors période de cohabitation, laisse néanmoins au Premier ministre le rôle non négligeable de maître d’œuvre du programme politique sur lequel le Président a été élu, et qui dispose pour ce faire de l’administration.
Cette révision pose aussi la question de l’équilibre des pouvoirs, et notamment du rôle des assemblées parlementaires dans un système institutionnel qui ne connaît pas de séparation stricte des pouvoirs. Le chef de l’État dispose d’un droit de dissolution de l’Assemblée nationale, alors que sa responsabilité politique ne peut être mise en cause par le Parlement. De plus, l’adoption d’une motion de censure contre le Gouvernement par l’Assemblée nationale est devenue, depuis 1962 et la dissolution de l’Assemblée à la suite de la motion de censure votée contre le Gouvernement Pompidou, un cas de figure très hypothétique.
Le chef de l’État peut apparaître, par ce mode d’élection, comme un chef de majorité, et non plus comme un arbitre au-dessus des contingences des partis. La majorité parlementaire a désormais pour vocation première le soutien de la politique présidentielle. L’élection législative doit confirmer le résultat de l’élection présidentielle et désigner une majorité acquise au président afin de lui donner les moyens de gouverner. La notion de majorité présidentielle s’est ainsi peu à peu imposée, alors qu’elle était inconcevable sous les IIIe et IVe Républiques. Le chef de l’État n’interférait alors guère dans les relations entre le Gouvernement et la majorité parlementaire, en dehors de la nomination du président du Conseil (le Premier ministre d’alors).