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Comme pour toute campagne électorale, l’élection présidentielle a un coût. Son financement est très encadré et obéit à des règles précises. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques joue un rôle essentiel pour aider les candidats à s’acquitter de leurs obligations.
Au sommaire de ce troisième et dernier épisode : "Combien coûte une campagne présidentielle ?".
1. Patrice : Je suis en compagnie de Chloé, étudiante en science politique, qui était déjà avec nous pour les deux premiers épisodes de cette série. Elle va répondre à toutes mes questions. La première concerne les modes de financement de la campagne pour l’élection du président de la République : comment est-elle financée ?
Chloé : Il existe deux modes de financement : un financement public et un financement privé.
[Intervention Patrice : Alors commençons par le financement public, de quelle nature est-il ?]
Chloé : C’est l’État qui prend en charge le financement public. Il intervient en deux temps. Tout d’abord, avant l’élection, l’État prend en charge directement tous les frais de "la propagande électorale", c’est-à-dire l’impression des bulletins de vote, des professions de foi, des fiches électorales, etc. Il n’y a aucune différence entre les candidats. Ils sont tous traités de la même manière. Qu’il s’agisse d’un « petit » candidat (entre guillemets) ou d’un favori, le même nombre de bulletins, de professions de foi est imprimé. Dans un deuxième temps, après l’élection, l’État assure le remboursement d’une partie des frais de campagne en fonction des résultats des candidats.
[Intervention Patrice : Et quelle forme prend le financement privé ?]
Chloé : Le financement privé peut prendre différentes formes. Il peut s’agir d’un apport personnel des candidats, soit sur leurs deniers personnels ou via un emprunt bancaire ; ou bien d’argent provenant d’opérations commerciales comme la vente de produits dérivés ; ou encore de contributions financières des partis politiques donc de l’argent provenant des cotisations des adhérents ou de prêts bancaires contractés par le parti ; et enfin les particuliers sont autorisés à faire des dons mais sous certaines conditions. Ces dons ne peuvent être effectués que par des personnes physiques de nationalité française ou résidant en France et ils sont plafonnés à 4600 euros par donateur. Tout don supérieur à 150 euros doit être versé par chèque.
[Intervention Patrice : Les entreprises peuvent-elles Chloé comme aux États-Unis participer au financement de la campagne ?]
Chloé : Non. Les entreprises – et c’est le cas aussi des associations, des fondations, des syndicats, des collectivités locales, ne peuvent financer une campagne. Depuis la loi du 19 janvier 1995, les dons mais également les avantages en nature sont proscrits.
2. Patrice : Est-ce que les candidats peuvent recevoir de l’argent d’un État étranger ?
Chloé : Non. Depuis 2017 et le vote de la loi pour la confiance dans la vie politique, un État étranger ou une banque non européenne (donc située hors de l’Union européenne) ne peuvent ni prêter, ni financer un parti politique français ou un candidat.
3. Patrice : Et quelles sont les dépenses types engagées par les candidats ?
Chloé : Toute campagne électorale implique des dépenses incontournables comme l’organisation de meetings publics ou la propagande imprimée mais chaque candidat peut affecter ses dépenses en privilégiant des domaines différents (réunions publiques, propagande audiovisuelle, déplacements, etc.).
4. Patrice : Qui contrôle les dépenses des candidats ?
Chloé : L’organisme qui contrôle les budgets de campagne est la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Cette commission est une autorité administrative indépendante qui a été créée par la loi du 15 janvier 1990 relative à la limitation des dépenses électorales et à la clarification des activités politiques.
[Intervention Patrice : Quelles sont ses missions ?]
Chloé : La Commission a deux grandes missions. La première consiste à contrôler les comptes de campagne à l’occasion des élections politiques et la seconde se rapporte à la réception – et à la vérification - des comptes des partis politiques, puis à leur publication.
[Intervention Patrice : Les décisions de la Commission Chloé peuvent-elles être contestées par un candidat ou un parti politique ?]
Chloé : Oui Patrice. C’est possible. Les décisions de la Commission peuvent être contestées et faire l’objet d’un recours devant le Conseil constitutionnel – qui en vertu de la Constitution exerce de larges compétences en matière de contentieux électoral. Un recours peut être exercé par exemple dans le cas du rejet des comptes de campagne d’un candidat ou en cas de contestation du montant du remboursement forfaitaire des frais de campagne.
5. Patrice : Quelles sont les obligations auxquelles sont soumis les candidats ?
Chloé : Les candidats doivent ouvrir un compte de campagne qui retrace l’origine des fonds reçus et la nature des dépenses engagées et désigner un mandataire financier qui est chargé de la gestion de ce compte. Le compte de campagne présente également dans une annexe les dépenses engagées par les partis politiques qui soutiennent les candidats.
[Intervention Patrice : Les dépenses sont-elles plafonnées ?]
Chloé : Oui Patrice. Les dépenses autorisées sont plafonnées. Pour les candidats présents au premier tour, le plafond est fixé à 16,8 millions d’euros et pour les deux candidats présents au second tour, le plafond est fixé à 22,5 millions d’euros.
6. Patrice : Et que risque un candidat qui ne respecte pas le plafond de dépenses autorisé ?
Chloé : Le non-respect du plafond des dépenses constitue une infraction. Le candidat qui s’en rend coupable encourt des poursuites judiciaires. Il doit reverser au Trésor public le montant du dépassement. Par exemple à l’occasion de l’élection présidentielle de 2012. Les dépenses de campagne de Nicolas Sarkozy - qui était candidat à sa réélection – ont avec environ 40 millions d’euros dépassé le montant maximum autorisé. Le Conseil constitutionnel a rejeté ses comptes de campagne le privant ainsi d’une partie du remboursement des frais engagés.
[Intervention Patrice : Comment les candidats Chloé sont-ils remboursés ?]
Chloé : Le remboursement est forfaitaire. Il dépend des résultats obtenus par les candidats et du respect des règles de financement de la campagne. Un enjeu crucial pour les candidats est d’obtenir au moins 5 % des suffrages exprimés au premier tour de scrutin car c’est ce seuil qui ouvre droit au remboursement des dépenses engagées jusqu’à 47 % (maximum) du plafond, soit un maximum de 8 millions d’euros. Si un candidat n’atteint pas ce seuil des 5 %, le remboursement est plafonné à 4,75 %, soit environ seulement 800 000 euros, c’est-à-dire donc dix fois moins que pour un candidat qui atteint les 5 %.
[Intervention Patrice : Et pour les deux candidats présents au second tour ?]
Chloé : Pour les deux candidats qui se qualifient pour le second tour, le remboursement est plafonné à 47,5 % des dépenses du second tour, soit environ 10,7 millions d’euros.
7. Patrice : Combien ont coûté Chloé les campagnes présidentielles de 2012 et 2017 ?
Chloé : La somme totale cumulée des comptes publiés de tous les candidats a atteint 74,11 millions en 2017, soit à peu près le même montant qu’en 2012, 74,02 millions.
[Intervention Patrice : En 2017, les candidats ont-ils tous respecté le plafond autorisé ?]
Chloé : Oui Patrice. Aucun des candidats n’a dépassé le plafond. Le candidat qui a dépensé le plus lors de cette campagne, c’est Emmanuel Macron avec un total d’environ 19,7 euros. Quant à celui qui a dépensé le moins, c’est le député des Pyrénées atlantiques, Jean Lassalle, avec environ 260 000 euros de frais de campagne.
[Intervention Patrice : On est donc bien loin Chloé des niveaux atteints pas les campagnes présidentielles américaines ?]
Chloé : Absolument ! Aux États-Unis, où les entreprises et les méga-donateurs peuvent financer les campagnes présidentielles à hauteur de dizaines de millions de dollars, les budgets peuvent facilement atteindre le milliard. C’est en 2012 qu’un candidat – Barack Obama – atteint pour la première fois le milliard de dollars. En 2016, Hillary Clinton bat tous les records avec la campagne la plus chère de l’histoire des États-Unis puisque celle-ci a coûté 1,2 milliard de dollars.
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