Le pouvoir réglementaire est défini comme le pouvoir dont disposent les autorités exécutives et administratives pour prendre unilatéralement (c’est-à-dire sans l’accord des destinataires) des actes exécutoires comportant des dispositions générales et impersonnelles.
À la tête de l’exécutif, le partage du pouvoir réglementaire est la règle.
- Sous la Ve République, le président de la République détient le pouvoir réglementaire pour les textes les plus importants, c’est-à-dire les décrets délibérés en Conseil des ministres (art. 13 de la Constitution).
- Le Premier ministre dispose du pouvoir réglementaire de droit commun : "Sous réserve des dispositions de l’article 13, [le Premier ministre] exerce le pouvoir réglementaire" (art. 21).
- En revanche, les ministres ne disposent pas du pouvoir réglementaire en vertu du texte constitutionnel. Il est toutefois possible au Premier ministre de déléguer le pouvoir réglementaire aux ministres. Par ailleurs, le juge administratif a depuis longtemps admis que le ministre disposait d’un pouvoir réglementaire pour organiser ses services (arrêt Jamart du Conseil d’État, 1936).
- Les autorités administratives indépendantes (AAI) disposent également d’un pouvoir réglementaire afin de mener à bien leur mission. C’est le cas, par exemple, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) ou de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).
- Depuis la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, les collectivités territoriales disposent d’un "pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences" (art. 72, alinéa 3).
Une des caractéristiques du régime de la Ve République réside dans l’absence de délimitation nette entre le pouvoir réglementaire du président de la République et celui du Premier ministre. La Constitution ne précise pas quels décrets doivent être délibérés en Conseil des ministres.
La répartition se fait en réalité au cas par cas.
Le chef de l’État signe trois types de décrets : les décrets dont une loi prévoit qu’ils doivent être délibérés en Conseil des ministres, ceux intervenant dans une matière dont l’usage veut que le Président y joue un rôle important (relations internationales, défense), et les décrets que le président de la République juge bon de signer.
Ce dernier élément révèle l’évolution des institutions, au profit du chef de l’État. Le Conseil d’État en a d’ailleurs pris acte. Dans un arrêt Allamigeon et Pageaux de 1994, le Conseil d'État a jugé que, lorsque le président de la République a signé un décret (qui a donc été délibéré en Conseil des ministres), celui-ci ne peut être modifié que dans les mêmes formes (signature du chef de l’État après délibération en Conseil des ministres). Cette jurisprudence est donc favorable à l’extension des compétences présidentielles réalisée depuis 1958.
La Ve République, une rupture
Sous la IIIe République, le pouvoir réglementaire était entièrement détenu par le président de la République. Au contraire, sous la IVe République, il était l’apanage du seul président du Conseil.
La Ve République marque une évolution importante dans ce domaine puisque contrairement aux régimes qui l'ont précédée, les normes réglementaires ne sont plus seulement des textes d’application des lois. Selon les termes de l’article 37 de la Constitution du 4 octobre 1958, il existe un pouvoir réglementaire autonome, intervenant dans des domaines où la loi n’a pas sa place.