Plusieurs facteurs sont à l’origine des situations de déficit des systèmes de retraite, parmi lesquels :
- l’augmentation des pensions moyennes : les personnes qui arrivent aujourd’hui à l’âge de la retraite sont bénéficiaires de pensions pleines et entières, ce qui n’a pas été le cas des générations précédentes, lesquelles n’ont pas bénéficié, depuis le début de leur carrière, du système mis en place à la Libération. Par ailleurs, les rémunérations ont progressé, donc les retraites également ;
- le versement des retraites sur une plus longue durée : du fait de l’augmentation de l’espérance de vie, le temps passé à la retraite s’accroît progressivement ;
- la diminution des ressources, soit :
- de manière structurelle, à cause du chômage endémique dont souffre la France. Les demandeurs d’emplois ne paient pas de cotisations sociales sur les retraites de base (seulement sur les retraites complémentaires), ce qui provoque une diminution de ressources pour le système de retraites et augmente les dépenses du Fonds de solidarité vieillesse, les périodes de chômage donnant lieu à la validation de trimestres sur une base non contributive ;
- de manière conjoncturelle, en raison de la crise sanitaire de 2020 qui a provoqué une baisse sans précédent de ressources pour le système de retraite (de l’ordre de 10% pour les cotisations sociales perçues).
- une augmentation du nombre de retraités par rapport au nombre des cotisants, du fait de l’arrivée à l’âge de la retraite des générations nombreuses nées après-guerre. Cette situation dégrade le ratio entre actifs et cotisants, ce qui a d’autant plus de conséquences que le système de retraite est fondé sur la répartition.
Face à des situations de déficits importants et récurrents, plusieurs solutions ont été mises en œuvre pour contribuer à un retour à l’équilibre des régimes de retraite.
Les mécanismes de compensation entre régimes de retraite visent à rétablir l’équilibre financier entre les régimes « excédentaires » (qui versent à l’ensemble de leurs ressortissants un montant de pensions de retraite inférieur à leurs ressources issues des cotisations) et les régimes « déficitaires » (qui versent un montant de pensions de retraite supérieur à leurs ressources issues des cotisations).
Dans le cadre de ce mécanisme de solidarité inter-régimes, les principaux régimes contributeurs sont la Cnav, la CNRACL et, dans une moindre mesure, le Régime des fonctionnaires de l’État. Les principaux bénéficiaires sont les exploitants et les salariés agricoles et, dans une moindre mesure, les régimes de retraite de l’ex-RSI.
Les subventions d’équilibre sont versées par l’État aux régimes de retraite qui ne disposent pas d’un nombre suffisant de cotisants pour payer les pensions de leurs retraités, ou qui sont en voie d’extinction car ils n’acceptent plus de nouveaux affiliés (ex. cas du Régime des Mines).
En 2021, ces subventions d’équilibre sont de l’ordre de 6,2 Md€. Elles sont principalement destinées aux régimes de retraite de la SNCF, des mines, de la marine et de la RATP. Cependant, cette situation connaît une évolution notable. Ainsi, la loi du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire prévoit que la SNCF cesse de recruter au statut "maison" à compter du 1er janvier 2020 : les nouveaux agents sont ainsi affiliés au Régime général (Cnav pour le Régime de base, Agirc-Arrco pour les régimes complémentaires), qui assurera dorénavant l’encaissement de leurs cotisations et le paiement de leurs droits futurs.
En conséquence, le régime spécial de la SNCF n’est plus financé que par un groupe fermé de cotisants – les agents recrutés avant 2020 – dont la population est appelée à décroître d’année en année au rythme des départs en retraite notamment. La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 a prévu le versement d’une compensation à l’État de la part de la Cnav et de l’Agirc-Arrco, qui perçoivent désormais les cotisations des nouveaux agents de la SNCF sans avoir à verser de pensions. "Si la crise sanitaire a ralenti les échanges entre les caisses, un protocole d’accord a été trouvé à l’issue du confinement. Une montée en puissance progressive est prévue : la compensation devrait atteindre 14 millions d’€ en 2020, 50 millions en 2021, 75 millions en 2022 et dépasser 100 millions d’€ à partir de 2023" (Avis présenté au nom de la Commission des affaires sociales sur le projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale, pour 2021, 19 novembre 2020).
L’adossement des régimes spéciaux sur ceux des salariés du secteur privé est un mécanisme technique qui permet aux entreprises concernées de ne pas avoir à provisionner dans leurs comptes officiels l’intégralité du poids des pensions. L’adossement doit cependant être neutre pour les comptes du Régime général : aussi, le bénéficiaire de l’adossement verse un « droit d’entrée » (une soulte) qui permet de compenser, dans le budget du Régime général de base et complémentaire (Cnav et Agirc-Arrco), l’arrivée du régime spécial.
À la fin août 2021, seules les Industries électriques et gazières (IEG) avaient été adossées au Régime général (en 2005).
L’intégration. On parle d’intégration lorsqu’un régime spécial de retraite est "absorbé" par le Régime général, tant au niveau de la retraite de base que de la retraite complémentaire. Depuis 1989, plusieurs régimes spéciaux ont ainsi été intégrés (par exemple, en 1996, celui des Caisses d’épargne ; en 2006, celui de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris).
Ces solutions, avant tout techniques, ne se substituent pas aux différentes mesures structurelles introduites dans les réformes successives qu’ont connues les systèmes de retraite.