La Constitution du 3 septembre 1791 met en place une monarchie constitutionnelle. Dans ce régime, la souveraineté appartient à la Nation mais le droit de vote est restreint.
Le suffrage est dit censitaire. Seuls les hommes de plus de 25 ans payant un impôt direct (un cens) égal à la valeur de trois journées de travail ont le droit de voter. Ils sont appelés "citoyens actifs". Les autres, les "citoyens passifs", ne peuvent pas participer aux élections.
Le suffrage est aussi indirect car les citoyens actifs élisent des électeurs du second degré, disposant de revenus plus élevés, qui à leur tour élisent les députés à l’Assemblée nationale législative.
Après une brève application du suffrage universel masculin pour élire la Convention en 1792, le suffrage censitaire et indirect est rétabli par le Directoire (Constitution du 5 fructidor an III) en 1795.
Il existe toujours des électeurs de premier et de second degrés, définis selon les critères suivants :
- les électeurs du premier degré doivent payer des impôts ou avoir participé à une campagne militaire ;
- les électeurs du second degré doivent percevoir des revenus élevés, évalués entre 100 et 200 journées de travail selon les cas.
Pour être élu, il faut être âgé de 30 ans minimum pour siéger au Conseil des Cinq-Cents et de 40 ans pour le Conseil des Anciens.
La Constitution du 22 frimaire an VIII (13 décembre 1799) établit le régime du Consulat. Elle institue le suffrage universel masculin et donne le droit de vote à tous les hommes de plus de 21 ans ayant demeuré pendant un an sur le territoire.
Mais ce droit est limité par le système des listes de confiance.
Il s’agit d’un scrutin à plusieurs degrés :
- les électeurs désignent au suffrage universel 1/10e d’entre eux pour figurer sur les listes de confiance communales ;
- ces derniers choisissent ensuite un 1/10e d’entre eux pour l’établissement des listes départementales ;
- les membres de la liste départementale élisent 1/10e d’entre eux pour former une liste de confiance nationale ;
- le Sénat conservateur (dont les membres sont nommés à vie) choisit ensuite, à partir de cette liste nationale, les membres des assemblées législatives (Tribunat et Corps législatif).
Le peuple ne désigne donc pas directement ses représentants.
Quant à l’exécutif, les trois consuls – terme inspiré de la Rome antique et censé rassurer – sont nommément désignés dans la Constitution.
Après des modifications (sénatus-consultes et plébiscites) de l’an X (1802, Bonaparte Premier consul à vie) et de l’an XII (1804), le Consulat fait place au Premier Empire.
La défaite de Napoléon Ier à Waterloo (18 juin 1815) entraîne la chute définitive de l’Empire et permet le rétablissement d’une monarchie constitutionnelle, avec, à sa tête, la dynastie des Bourbons : c’est la Restauration.
Le suffrage universel masculin est aboli et le suffrage censitaire rétabli :
- seuls les hommes de 30 ans payant une contribution directe de 300 francs ont le droit de vote ;
- pour être élu, il faut avoir 40 ans et payer au moins 1 000 francs de contributions directes.
La loi électorale du double vote du 29 juin 1820 permet aux électeurs qui payent le plus d'impôts de voter deux fois. Ces mesures cherchent à avantager les grands propriétaires fonciers, c’est-à-dire l’aristocratie conservatrice et légitimiste.
Après la révolution des Trois Glorieuses (27, 28, 29 juillet 1830), la Restauration fait place à la Monarchie de Juillet (Louis-Philippe Ier). Le droit de vote est élargi.
Si le suffrage est toujours censitaire, le cens nécessaire pour être électeur passe de 300 à 200 francs (100 francs dans des cas particuliers) et de 1 000 à 500 francs pour être élu (loi du 19 avril 1831).
De même, l’âge minimum pour voter est abaissé de 30 à 25 ans et celui pour être élu de 40 à 30 ans. La loi du double vote est supprimée.
Le mouvement révolutionnaire qui éclate en février 1848 met fin à la Monarchie de Juillet et institue la IIe République.
Le suffrage universel masculin est adopté par le décret du 5 mars 1848. Sont électeurs, tous les Français âgés de 21 ans et jouissant de leurs droits civils et politiques. Le droit d’être élu est accordé à tout électeur de plus de 25 ans. Le vote devient secret.
Ainsi, hormis la parenthèse du régime de Vichy (le 10 juillet 1940, le Maréchal Pétain se voit remettre les pleins pouvoirs constituants par une Assemblée élue au suffrage universel), la forme républicaine du gouvernement et l’exercice du droit de suffrage ne sont plus remis en cause et vont désormais de pair.
Une seule exception, durable : par la loi du 27 juillet 1872, le droit de vote est refusé aux militaires. Ce statut particulier lui vaut le surnom de "grande muette".
Pendant longtemps, les femmes ne peuvent ni voter ni être élues, puisque leur rôle se limite à la gestion du foyer. Par ailleurs, la plupart des hommes s'opposent à leur participation à la vie politique, craignant que leur vote ne soit dicté par l'influence de l'Église.
La participation massive des femmes à l'effort de guerre pendant la Première Guerre mondiale et le mouvement des suffragettes (militantes du droit de vote des femmes) venu du Royaume-Uni font évoluer le débat. Mais l’opposition du Sénat fait échec à toute évolution dans l’entre-deux-guerres.
Il faut attendre l'ordonnance du 21 avril 1944 du Gouvernement provisoire de la République française, signée par Charles de Gaulle pour que les femmes obtiennent le droit de vote. L'article 17 dispose que "les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes".
Dans les faits, les Françaises votent pour la première fois aux élections municipales d’avril et mai 1945.
L’ordonnance du 17 août 1945 dispose : "Les militaires des trois armées sont électeurs dans les mêmes conditions que les autres citoyens", rompant avec la pratique en cours depuis 1872.
Ils sont néanmoins éligibles sous certaines conditions. En activité de service, ils ont pour interdiction d'adhérer à des groupements ou associations à caractère politique. Ils peuvent se porter candidats à une élection. En cas de victoire, ils sont placés en position de détachement le temps d'assurer leur mandat politique.
À la Libération, la Constituante hésite entre l’assimilation totale et l’association des territoires français d’outre-mer.
La loi du 7 mai 1946 (dite loi Lamine Guèye) proclame citoyens tous les ressortissants de l’empire colonial. Auparavant, la citoyenneté était la plupart du temps l’apanage des seuls ressortissants de statut civil français, et non des autochtones.
Si la loi est inscrite dans la Constitution du 27 octobre 1946, le droit de vote demeure inégalitaire. Elle mentionne que "des lois particulières établiront les conditions dans lesquelles ils exercent leurs droits de citoyens", art. 80 de la Constitution. La IVe République institue l’Union française dont l'ensemble des ressortissants sont citoyens. Le statut de l'indigénat est aboli.
C’est la loi du 23 juin 1956 (dite loi-cadre Defferre) qui institue le suffrage universel et le collège unique dans les territoires d’outre-mer. Votée à une très forte majorité dans une situation politique délicate, elle a prouvé selon l’historienne Georgette Elgey qu’il était possible à la IVe République "de devancer l'événement et de permettre une décolonisation réussie".
Le traité de Maastricht institue une citoyenneté européenne. Tous les citoyens étrangers ayant la nationalité d’un des pays membres de l’Union européenne peuvent, lors des élections municipales et européennes, voter et se présenter dans l’État membre où ils résident.
Cependant, la Constitution (article 88-3) précise qu’ils ne peuvent devenir ni maires, ni adjoints.