La Ve République confère au président de la République une centralité à contre-courant de toute l’histoire constitutionnelle française antérieure.
L’élection du Président au suffrage universel, que le général de Gaulle n’avait pas mise en place en 1958, résulte d’une réforme de 1962 largement combattue à l’époque par les parlementaires. Pour marquée leur opposition, les députés ont d'ailleurs voté une motion de censure à l'égard du gouvernement de Georges Pompidou.
L'adoption de cette réforme a transformé le fonctionnement des institutions, passant d'’un régime d’assemblée à un régime plus présidentiel. Depuis la première élection du président de la République au suffrage universel organisée en 1965, l'élection du chef de l'État tend à commander toutes les autres élections. Ce caractère fondamental de l'élection présidentielle a été encore renforcée après la réforme de 2000 sur le quinquennat. La réduction de la durée du mandat présidentiel de sept à cinq ans s'est accompagnée d'un "inversion du calendrier électoral" pour les élections de 2002. Depuis cette date, les élections législatives se déroulent immédiatement après la présidentielle. Les législatives tendent ainsi à confirmer le résultat de l'élection présidentielle.
Le rôle clé de l’élection présidentielle est acquis pour tous les acteurs :
- les politiques eux-mêmes (les petits partis savent que cette élection est une tribune qu’il serait dommage de boycotter, quoi qu’ils pensent par ailleurs de la prééminence présidentielle) ;
- les journalistes et commentateurs, qui alimentent un feuilleton parfaitement ajusté aux canons médiatiques (hyperpersonnalisation, élimination en deux temps des candidats, duel entre les deux tours, etc.) ;
- les électeurs enfin qui, même lorsqu'ils ne s’intéressent que modérément à la politique, acceptent volontiers de se prendre au jeu. Même dans un contexte de recul de la participation électorale, l’élection présidentielle est le scrutin pour lequel les Français se déplacent le plus volontiers.
Le rôle du président de la République français est atypique par rapport aux régimes parlementaires classiques.
Dans ces régimes, seule l’assemblée souveraine dont émane le Premier ministre est élue, le chef d’État n’ayant qu’un rôle symbolique (c’est le cas dans les monarchies britannique, belge ou espagnole, mais aussi pour la présidence allemande ou italienne).
L’élection directe du président relève davantage des régimes présidentiels comme celui des États-Unis (encore que le système des grands électeurs relève du suffrage universel indirect) ou du Brésil.