Au début des années 2000, Serge Tchuruk, PDG d’Alcatel (télécommunications) proclamait : "Alcatel doit devenir une entreprise sans usines". Il entendait rétrocéder à des sous-traitants ses activités industrielles les plus lourdes et se recentrer sur la recherche et développement (R&D) et les services. Ainsi, les entreprises du textile, de la chaussure, du jouet ou de la micro-informatique sont progressivement devenues des firmes de recherche, de design et de marketing, dont les capacités de production ont été délocalisées dans des "pays-ateliers" (Asie du Sud-Est, Maghreb, Europe de l’Est…).
Depuis les années 1980, le poids de l'industrie en France a été divisé par deux. En 2018, ce secteur ne représentait plus que 13,4% du produit intérieur brut (PIB) français. Tous les pays n’ont cependant pas suivi cette voie, certains ont maintenu un important tissu industriel comme l’Allemagne (où le secteur industriel représente 25,5% du PIB en 2018), la Suisse, les Pays-Bas ou la Suède (source : France Stratégie).
La mondialisation de l’économie conduit à relativiser les avantages liés au processus de délocalisation tel que conçu dans les années 1980 :
- l’augmentation des prix du pétrole, également plus volatiles, pèse sur le transport ;
- le coût du travail, jadis élément déclencheur des délocalisations, augmente également dans les pays comme la Chine (+15% par an) qui délocalise à son tour ;
- les économies obtenues sur la main-d’œuvre ne compensent plus nécessairement les coûts logistiques et les tarifs douaniers ;
- se rapprocher localement du consommateur permet une adaptation plus rapide aux évolutions du marché et une meilleure interaction entre les différents processus de fabrication (contrôle-qualité accru, fluidité accrue entre les activités de R&D et de production, livraisons plus rapides, relation-client plus agile...).
La relocalisation peut se définir comme le rapatriement dans le pays d’origine de tout ou partie d’une activité précédemment délocalisée vers un pays tiers à faibles coûts salariaux.
La Direction générale de la compétitivité de l’industrie et des services (DGCIS, direction du ministère de l'économie et des finances) a proposé une typologie des relocalisations observées en France qui permet d’identifier trois principales logiques économiques :
- les relocalisations d’arbitrage, souvent opérées par de grands groupes par comparaison de différents sites envisageables, avec la possibilité de la réversibilité ;
- les relocalisations de retour, consécutives à des délocalisations qui n’ont pas fonctionné (à cause de la disparition d’avantages comparatifs, de coûts cachés ou du développement de la contrefaçon) ;
- les relocalisations de développement compétitif, permettant l’approfondissement des positions établies sur les marchés extérieurs, notamment pour les PME qui cherchent par leur relocalisation à se rapprocher des compétences qui leur font défaut et des marchés de consommation.
La Banque des territoires-groupe Caisse des dépôts a répertorié 200 relocalisations de 2005 à 2018 (Rossignol, Mauboussin, Solex et Kusmi Tea...). Douze d'entre d'elles, soit 6%, ont eu recours à des aides publiques directes, qui ne sont donc pas un facteur déterminant.
La Banque publique d’investissement (Bpifrance) souligne l’apparition d’un solde positif des créations d’usines en France en 2018.