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Climat : la CEDH condamne un État pour son manque d'action contre le changement climatique

Temps de lecture  3 minutes

Par : La Rédaction

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a reconnu, dans une décision du 9 avril 2024, le droit des individus d'être protégés par l'État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie. Les autorités ont le devoir de prendre des mesures pour atténuer des effets "potentiellement irréversibles".

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) reconnait pour la première fois le droit des individus d'être réellement protégés par l'État contre les effets néfastes du changement climatique. Dans un arrêt rendu mardi 9 avril 2024, la Cour a condamné la Suisse pour violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. La décision fait suite à la requête d'une association suisse qui dénonçait des "manquements des autorités suisses" pour atténuer les effets du changement climatique. 

La Cour s'est prononcée sur trois affaires de Grande Chambre. Sur les trois requêtes déposées à l'origine, deux ont été déclarées irrecevables. Seule l'association écologiste suisse a pu agir au nom de ses membres.

Le droit à une protection concrète

La CEDH a condamné l'État suisse pour violation du droit au respect de la vie privée et familiale (article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme sur le droit au respect de la vie privée et familiale). Selon la Cour, l'article 8 de la Convention consacre "un droit pour les individus à une protection effective, par les autorités de l'État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie, leur santé, leur bien-être et leur qualité de vie".

Cette décision rappelle les engagements internationaux des États (accord de Paris de 2015, notamment) pour lutter contre le réchauffement climatique. Les États doivent prendre des mesures "pour prévenir une augmentation des concentrations de GES [gaz à effet de serre] dans l’atmosphère terrestre et une élévation de la température moyenne de la planète à des niveaux qui pourraient avoir des répercussions graves et irréversibles sur les droits de l’homme protégés par l’article 8". 

La Cour constate par ailleurs la violation du droit à un procès équitable (article 6 de la Convention sur l'accès à un tribunal). "Les juridictions suisses n’ont pas expliqué de façon convaincante pourquoi elles ont estimé qu’il n’y avait pas lieu d’examiner le bien-fondé des griefs de l’association requérante", estime la CEDH. 

Des requêtes soumises à des conditions strictes de recevabilité

La CEDH a toutefois rejeté les requêtes dans deux autres affaires : 

  • contre le Portugal et 32 États sur "les effets présents et les graves effets futurs du changement climatique", les voies de recours internes au Portugal n'étant pas épuisées
  • contre la France face au réchauffement climatique, le requérant ne pouvant pas prétendre à la qualité de victime, au sens de l'article 34 de la Convention.

L'absence des critères exigés à l'article 34 est également le motif de la Cour pour déclarer irrecevables les actions individuelles de quatre requérantes, membres de l'association suisse. La CEDH rappelle les deux conditions pour être qualifié de victime

  • l'exposition de manière intense aux effets néfastes du changement climatique ;
  • un besoin impérieux d’assurer la protection individuelle du requérant. 

L'association a au contraire le droit d’agir au nom de ses adhérents sans avoir à prouver que ces adhérents répondent aux critères de victimes.