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© Riccardo Milani - Hans Lucas/AFP

La gouvernance du sport en France : ses atouts et ses défis

Temps de lecture  20 minutes

160 000 clubs sportifs, 119 fédérations, ministère des sports, Comité national olympique et sportif français, Agence nationale du sport, collectivités, entreprises… Les acteurs de la gouvernance du sport en France sont nombreux et diversifiés. Comment est organisée cette gouvernance et quelles en sont les limites ?

Le sport français est-il bien gouverné ? Est-ce que les atouts et les limites du modèle français vont expliquer la performance des athlètes français aux Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024 ? Au-delà des seules médailles, la gouvernance du sport parvient-elle à utiliser le potentiel des activités physiques et sportives pour favoriser un mieux vivre ensemble ? Cette gouvernance mériterait-elle d'évoluer ? Ces interrogations surgissent dans un contexte où :

  • certains dirigeants de fédérations sportives sont contestés pour leurs pratiques de gouvernance ;
  • plusieurs lois relatives à l'éthique et la gouvernance du sport ont été votées, sans beaucoup d'effets sur le terrain, lors des mandats de neuf ministres des sports entre 2007 et 2022 ;
  • des sportifs d'élite veulent peser sur les décisions qui affectent leur activité ou/et leur image ;
  • des maires revendiquent plus d'aides pour rénover un parc d'équipements sportifs vieillissant et soutenir le sport local ;
  • des acteurs d'horizons divers (politique, social, société civile…) militent pour une approche plus inclusive, intègre et responsable du sport.

Définition, périmètre et niveaux de la gouvernance du sport

Parler de gouvernance du sport nécessite de définir les deux termes, tous deux polysémiques. Le sport comprend différentes acceptions selon  :

  • les modalités de pratique : loisir, compétition, professionnelle, de haut niveau (équipes nationales) ;
  • les modes d'organisation : par des acteurs publics, associatifs ou encore commerciaux (fitness, golf, équitation, ski, bowling…) ou de manière autonome (dans 41% des cas selon l'étude Sport dans la ville, 2019) autour de pratiques libres et spontanées (running, parcours sportif ou vita, randonnée, street workout…) et d'application d'entraînement virtuel (Swift, Mycoach…) ;
  • les cadres (scolaire/civil/militaire/entreprise/à domicile) et les lieux de pratique (en milieu naturel 38%, à domicile 24%, dans une installation sportive 22%, en ville ou dans un parc 9%… selon Les chiffres clés du sport, 2023) ;
  • les motivations et finalités recherchées (éducation, inclusion, mixité, lien social, dépassement de soi, économie, spectacle, tourisme et en priorité santé, bien-être et cohésion sociale).

La définition et le périmètre du sport peuvent donc être très larges et à géométrie variable. La terminologie la plus générique est celle des activités physiques et sportives (APS). En 2020, deux personnes sur trois déclarent pratiquer une APS régulièrement. La pratique régulière est plus fréquente chez les hommes (71%, contre 60% pour les femmes) et recule avec l'âge, d'abord autour de 30 ans, puis après 50 ans (Les pratiques physiques et sportives en France, Injep, mars 2023). La France se classe dans les études européennes en matière de pratiques des APS dans une position moyenne assez loin des pays scandinaves et de la Suisse (Sport et activité physique en Europe, Eurobaromètre 2022).

Concernant le sport institutionnel, environ 16 millions de licences sportives ont été délivrées, en 2020 (dont 38% à des femmes et 45% à des jeunes de moins de 15 ans), par les fédérations sportives contre 2 millions en 1950. Ces licenciés sont actifs au sein de 160 000 clubs sportifs membres de 119 fédérations sportives agréées par l'État. L'impact social, politique, économique, médiatique du sport (compétition/spectacle sportif) n'a donc cessé de progresser pour faire du sport un phénomène social total.

La gouvernance renvoie à la manière de diriger et d'exercer le pouvoir, que ce soit pour un pays, un secteur d'activité ou encore une organisation. La gouvernance du sport peut ainsi se concevoir à travers trois dimensions interconnectées :

  • la gouvernance du système sportif national organisant les relations, et à différents niveaux, entre différents acteurs publics, associatifs et commerciaux ;
  • la gouvernance politique encadrant les rapports plus spécifiques entre les acteurs publics nationaux, régionaux, locaux et les organisations sportives notamment fédérales et leurs clubs locaux ;
  • la gouvernance organisationnelle, c'est-à-dire la manière dont les organisations sportives sont dirigées et contrôlées. 

Les acteurs de la gouvernance du sport en France

Le système sportif national est composé de quatre acteurs clés :

  • le mouvement sportif et olympique représenté par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et les fédérations sportives nationales ;
  • l'État, avec le ministère des sports, mais aussi d'autres ministères : l'Éducation nationale avec l'éducation physique et sportive (EPS) et le sport scolaire, l'enseignement supérieur avec les établissements en sciences techniques des activités physiques et sportives (STAPS) et le sport universitaire, les armées avec le sport militaire ;
  • les collectivités territoriales (régions, départements et communes au regard de leurs interventions respectives – le sport étant une compétence partagée depuis la loi NOTRe du 7 août 2015) ;
  • le monde économique. Il correspond à la filière économique du sport comprenant, en amont, les fabricants et distributeurs d'articles de sport (dont le puissant groupe Décathlon, 15 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2022) et les constructeurs d'équipements sportifs (stades, gymnases, piscines…) et, en aval, les médias sportifs, les agences de marketing sportif et les sponsors. De nombreux secteurs économiques connexes sont aussi liés à la filière économique du sport : tourisme, santé, assurances, bâtiment et travaux publics, transports, hôtellerie-restauration (…). 

La gouvernance systémique nationale du sport relève ainsi de l'interaction entre ces quatre grands acteurs qui sont eux-mêmes en lien avec des organisations supranationales et transnationales. Deux ont une particulière importance par le double cadre politique et juridique qu'elles imposent : l'Union européenne (UE) et le Comité international olympique (CIO)/les fédérations sportives internationales. Depuis les années 2000 et encore plus à l'ère du digital, le sport spectacle est devenu un phénomène mondialisé qui en complexifie les enjeux et les modalités de consommation. La gouvernance du sport français doit affronter les défis qui découlent de cette évolution :

  • des nouveaux acteurs géopolitiques utilisant le soft power sportif – Chine, Russie, Qatar, Arabie saoudite notamment ;
  • de puissants acteurs économiques bouleversant l'industrie du spectacle sportif : les ligues privées (NBA, X Games, UFC pour le MMA…), les grands groupes de divertissement avec des chaînes payantes (Canal+, Eurosport, BeIn sports…), les plateformes de streaming (Apple TV, Amazon Prime Video, Netflix, Disney plus, DAZN…) et les réseaux sociaux avec des effets pas toujours bénéfiques sur la santé (sédentarité, montée de l'obésité). 

Depuis les années 2000, le sport institutionnel et olympique est aussi confronté à la montée en puissance de nouvelles pratiques, notamment des sports extrêmes et de défis (ski free ride, kite surf, VTT de descente, ultra-trail…) et de l'e-sport, soutenu dans leur cadre évènementiel notamment par le marketing disruptif de la marque Redbull. Selon l'Autorité nationale des jeux, les sites de paris sportifs en ligne, autorisés en France depuis 2010, connaissent une forte dynamique avec 597 millions d'euros misés pour la seule coupe du monde de football 2022 et une mise totale de 1,38 milliard sur les paris sportifs qui concernent essentiellement trois sports le football (56%), le tennis (22%) et le basket (12%).

La gouvernance du système national du sport comme celle de la gouvernance politique impactent le fonctionnement de la gouvernance des fédérations sportives qui doit intégrer les évolutions de la société française et plus généralement de l'environnement national, européen et international. 

Un modèle étatisé du sport producteur de médailles

La France s'appuie sur un modèle d'organisation du sport construit au début des années 1960 pour améliorer son rang dans la hiérarchie sportive internationale. Une politique structurante pour soutenir le sport de compétition/de haut niveau et de mise sous tutelle des fédérations a été mise en œuvre par la construction et la rénovation d'équipements sportifs, mais aussi par la formation des cadres et des entraîneurs via des diplômes d'État dédiés et obligatoires pour encadrer le sport.

Le ministère des sports et les fédérations sportives nationales représentent le duo coordinateur de la gouvernance du sport, notamment sur le sport de haut niveau. Le modèle français incarne aussi le "modèle européen du sport" : il place le sport de haut niveau, le sport professionnel et le sport pour tous sous le contrôle des fédérations avec une approche solidaire et unitaire, soutenue par une régulation étatique et européenne.

Le ministère des sports finance, par le biais d'un partenariat avec chaque fédération, encadré par des conventions d'objectifs depuis 1984, 1 600 postes de conseillers techniques du sport (fonctionnaires, qui sont détachés auprès de 79 fédérations nationales). Cet apport en personnel s'additionne aux subventions directes, historiquement fléchées vers le sport d'élite et ses 16 000 sportifs de haut-niveau (dont 40% de femmes). Dans les sports collectifs, la France s'appuie aussi sur le poids croissant – 3 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2019 – de plusieurs ligues professionnelles de sports collectifs (football, rugby, basket-ball, volley-ball, hand-ball, hockey sur glace), placées sous la tutelle de fédérations sportives, de clubs professionnels et de leurs centres de formation performants au niveau international.

Depuis l'arrêt Bosman de 1995 (libre circulation des sportifs professionnels au sein de l'Union européenne), la France a réussi, grâce à son système de formation performant, à exporter ses meilleurs joueurs vers les plus grands clubs européens. Ainsi, la France se classe, depuis la fin des années 1990, tant chez les hommes et que chez les femmes, parmi les meilleures nations mondiales dans les sports collectifs majeurs (football, rugby à XV, basket-ball, handball et volley-ball). En revanche, dans les sports individuels, la France, par son modèle étatisé autour d'un établissement public dédié à la formation des meilleurs athlètes (Institut national du sport, de l'expertise et de la performance – Insep) et de filières de haut niveau, a produit l'essentiel de ses médailles internationales dans des sports olympiques historiquement peu professionnalisés : canoë-kayak, escrime, natation, cyclisme sur piste et judo.

Aux Jeux de Rio en 2016, la France a obtenu 42 médailles (7e rang des nations). Aux jeux de Tokyo en 2021, elle en a récolté seulement 33, dont 10 en or, (8e au rang des nations). Si la France se distingue traditionnellement aux jeux d'hiver par des médailles en ski alpin et en patinage artistique, ce sont le biathlon, le snowboard et le ski acrobatique qui lui permettent de se classer 8e nation depuis les années 2010 (12e à Pékin en 2022). Pour les JOP 2024, l'objectif premier est de terminer à la 5e place

La France est également un pays qui obtient traditionnellement de bons résultats aux Jeux paralympiques d’hiver (depuis leur première édition en 1976) se classant 4ème au classement des médailles lors des éditions 2018 et 2022.  Pour les Jeux d’été, depuis leur création en 1960, elle recule et se classe seulement 12ème en 2016 et 14e à Tokyo 2021, assez loin derrière la Chine et les pays anglo-saxons beaucoup plus soutenant dans le domaine du sport d’élite paralympique. Cependant, pour la première fois, le gouvernement alignera symboliquement, lors des JOP de Paris 2024, les montants des primes étatiques versées aux médaillés olympiques à ceux versés aux médaillés paralympiques. 

La concurrence s'est beaucoup densifiée aux JO (croissance très importante des investissements consacrés par la plupart des grandes nations et de pays émergents). La Chine aurait investi 500 milliards de dollars pour préparer et organiser les JO 2008 de Pékin (elle termine à la première place devant les traditionnels vainqueurs américains et 3e aux JO d'hiver 2022, tous les deux organisés à domicile). Depuis 2000, la Grande-Bretagne a multiplié son soutien au sport d'élite par six (2,5 fois l'investissement français) via une stratégie de spécialisation très ciblée sur des disciplines pourvoyeuses de médailles. C'est pourquoi, depuis 2008, elle s'est classée régulièrement sur le podium des nations aux JO d'été.

Malgré la férocité de cette concurrence internationale, la France, à partir d'une stratégie généraliste, rayonne encore, y compris dans des disciplines non olympiques très populaires : rugby à XV, sports automobile et motocycliste ou encore le karaté et la pétanque. Cependant, ce modèle, très étatisé et plus interventionniste que dans les autres pays de l'UE, explique que nombre des 36 fédérations olympiques nationales soient restées dans une culture de dépendance à l'aide de l'État. De plus, les demandes croissantes de sport loisir, de sport santé et de cohésion sociale questionnent régulièrement la capacité du modèle fédéral français, soutenu fortement par l'action publique, à y répondre. 

La structure financière du sport en France

L'ensemble du soutien public direct au sport (hors JOP 2024) serait de 20 milliards d'euros dont 60% relèvent des collectivités territoriales (Financement du sport par les collectivités territoriales, BPCE, 2022). Le secteur public du sport emploierait 102 000 personnes, pour l'essentiel des professeurs d'EPS au niveau de l'État et 60 000 dans la fonction publique sportive territoriale. L'action des départements et des régions, évaluée à 1,4 milliard d'euros, concerne les équipements sportifs scolaires du second degré, les équipements de grande capacité et le soutien au sport de haut niveau. Mais les communes sont l'acteur central de proximité avec 8 milliards d'euros. Elles possèdent plus de 80% des équipements sportifs dont elles assurent la construction, la rénovation et bien souvent la gestion et l'entretien. Elles apportent un soutien financier aux associations sportives ainsi qu'à l'organisation de manifestations sportives. 

Ces clubs sportifs reposent principalement sur le bénévolat (dirigeants, arbitres/juges, initiateurs, accompagnateurs…), socle fondamental avec 3,2 millions de personnes investies pour une valorisation de 274 000 emplois équivalent temps plein estimée à un apport de 10 milliards d'euros (Le mouvement sportif : quels effets sur la société française et son économie ?, CDES, mars 2018). La coopération intercommunale permet de "prendre en charge les équipements les plus onéreux comme les piscines ou en intervenant pour le compte des petites communes" (BPCE, 2022). 

Le sport représente ainsi plus de 10% du budget des communes et intercommunalités qui apportent un soutien déterminant au sport associatif par la mise à disposition gratuite ou à faible coût des installations sportives aux 160 000 associations sportives. Ce soutien explique l'accessibilité au sport pour tous et aux jeunes. À ce financement clé, s'ajoutent le sponsoring (les clubs amateurs reçoivent 40% du sponsoring sportif selon l'étude Sporsora, avril 2021) et le mécénat sportif croissant des entreprises depuis les années 2000 (le sport est soutenu par 46% des entreprises selon le Baromètre 2022 du mécénat d'entreprise Admical) qui passent aussi de plus en plus via la montée en puissance du crowdfunding.
 

Financement public du sport en France : plus de 20 milliards d'euros par an
Entité publiqueMontant (en milliards)
Collectivités territoriales (équipements, soutien aux associations …)12,5
Dont : Communes8
Départements et régions1,4
Intercommunalités3,1
État : (EPS, sport de haut niveau)6,5 (dont 5.5 pour l'EPS)
Sécurité sociale (médecine du sport…)environ 1

Source : Adapté de l'étude Financement du sport par les collectivités territoriales, BPCE, 2022 (en milliards d'euros)

Ces ressources publiques et privées ont permis d'accélérer la professionnalisation des clubs sportifs en complément des programmes d'aide à l'emploi lancés dans les années 1980-90 (plan sport emploi et aides à l'emploi aux associations). Le sport participe à la lutte contre le chômage via la création d'emplois non délocalisables. Le nombre d'entreprises du secteur a presque doublé entre 2008 et 2017, et le secteur sport (offreurs de pratique sportive, organisateurs d'évènements et gestionnaires privés d'équipements) emploie aujourd'hui 163 500 salariés et 65 000 emplois non-salariés (moniteurs de ski par exemple et de nombreux microentrepreneurs) qui travaillent pour 23 000 employeurs, dont 80% sont des associations à but non lucratif (Les chiffres clés du sport, 2023).

Il reste que les situations de précarité (temps partiel non choisi) persistent et les niveaux de rémunération et les perspectives d'évolution professionnelle restent souvent modestes. En outre, compte tenu de la petite taille des organisations et du profil des employeurs (dirigeants bénévoles), la gestion des ressources humaines y est peu et insuffisamment développée. Toutefois, la création d'une convention collective nationale du sport en 2005 a marqué le développement d'un dialogue social généralisé dans le secteur privé associatif et commercial. 

Depuis les années 2000, les acteurs publics ont rationalisé le pilotage de leurs politiques via de nouveaux outils. La loi organique relative aux lois de finance du 1er août 2001 a permis au ministère des sports de mieux cibler les objectifs de la politique du sport français et d'en rendre compte par des indicateurs plus transparents. Les collectivités territoriales s'appuient sur des diagnostics et des projets sportifs territoriaux, des politiques formalisées et une contractualisation avec les associations sportives voire aussi avec des entrepreneurs sportifs locaux pour répondre aux besoins des usagers ou gérer certains équipements sportifs de loisir.  

Les difficultés d'une "nouvelle gouvernance" plus partenariale et partagée

Malgré ces nouvelles approches et l'importance de l'argent public consacré au sport, l'articulation des politiques publiques sportives n'est toujours pas optimale :

  • jeux politiques sclérosants au niveau national entre le ministère des sports et le CNOSF par exemple et entre le régional et le local (doublon de financement) ;
  • fortes inégalités territoriales en matière d'équipements et de disparité des politiques sportives communales dont les moyens peuvent varier de 1 à 3 (BPCE 2022). 

Elle n'est pas, non plus, toujours lisible :

  • au niveau de l'État (nécessité d'une réelle collaboration interministérielle pour porter la vision d'ensemble par exemple au niveau des rythmes scolaires et du lien avec la culture sportive et la formation vers le sport d'élite) ;
  • au niveau des territoires (faible capacité à répartir les responsabilités, penser des équipements multi-usages et à mutualiser des moyens et des personnels). 

C'est pourquoi, face aux besoins de coordination et de meilleure efficience d'ensemble, une Agence nationale du sport (ANS), sous la forme d'un groupement d'intérêt public, a été créée en 2019. Elle rassemble le ministère des sports, le mouvement sportif (CNOSF et fédérations), les pouvoirs publics régionaux et locaux et le monde économique et social qui décident ensemble de la régulation du système sportif national.

L'ANS, opérateur de l'État, coordonne le financement du sport français autour de deux pôles : le sport de masse et le sport d'élite. Son budget 2023 est de 463 millions d'euros, dont une subvention de l'État (265 millions) et un prélèvement de 5% sur le 1,6 milliard de droits de diffusion sportive (à 85% via le football) et d'un prélèvement sur toutes les formes de paris sportifs en France. Au niveau territorial, la création de conférences régionales du sport et des conférences des financeurs du sport vise à donner plus de lisibilité et de cohérence aux politiques sportives publiques.

Cette promesse n'a, pour l'instant, pu être tenue du fait du manque de clarification des compétences de chaque niveau de collectivités et d'identification d'un chef de file (rapport, Cour des comptes ANS, 2022). Malgré ces changements et l'introduction d'un modèle de gouvernance plus partagée, le sport français reste, en effet, encore dominé par le rôle central du ministère des sports. L'enjeu de travailler par le sport, du national au local, de manière plus interministérielle et de concerter les politiques publiques sectorielles (santé, social, éducation, tourisme, économie…) en identifiant clairement les responsabilités, est encore trop peu utilisé. Cela se réalise essentiellement lors de l'accueil de très grands évènements sportifs internationaux dont la stratégie a été fortement renforcée depuis le succès de la coupe du monde de football 1998 et avec la création, en 2004, de la délégation interministérielle aux grands évènements sportifs en charge de l'accompagnement des organisateurs.

Les enjeux du sport sont nombreux : 

  • susciter et accompagner les investissements privés (sport professionnel, nouvelles pratiques : futsal, padel…) ;
  • développer des partenariats publics-privés pour construire les équipements lourds (méga complexes, grands stades de compétitions…) ; 
  • faire appel au privé (associatif mais aussi commercial) pour gérer les équipements de loisirs de proximité et les adapter sur le plan énergétique et numérique. 

Sur plus de 80 000 équipements sportifs (dont 1 800 piscines, 12 000 gymnases et 5 000 salles polyvalentes), la moitié d'entre eux date d'avant 1975 (Étude BPCE, 2022).  Le gouvernement a lancé, en 2021, le financement de 5 000 installations sportives de proximité pour des zones carencées pour l'accessibilité à la pratique. 

Un modèle à l'épreuve de la mondialisation

Un des enjeux aujourd'hui est la capacité des acteurs à répondre aux nouvelles attentes (sport loisir bien-être, flexibilité, nature plutôt que performance, tout au long de la vie et sport adapté…) et nouveaux usages (pluriactivité et pluralité des cadres). Les politiques communales et fédérales doivent aussi s'adapter aux pratiques libres et émergentes mais aussi démontrer leur capacité à mieux travailler avec le monde marchand. Malgré la complexité (hétérogénéité des acteurs), et les limites de la gouvernance du sport français (notamment l'organisation très centralisée et le travail intersectoriel des APS trop peu mis en œuvre et articulé par les acteurs publics), elle a fait ses preuves par sa capacité à organiser un très grand nombre d'évènements sportifs internationaux ponctuels (Championnats d'Europe, du monde) et récurrents (Tour de France, Tournoi des 6 nations, Ultra trail du Mont-Blanc…).

Aujourd'hui, la montée des dérives dans le sport appelle à de nouvelles formes de régulation du local à l'international. La mondialisation financière, digitale et géopolitique du sport professionnel et spectacle et la croissance des enjeux autour du sport posent des questions fondamentales et complexes en lien avec l'éthique et l'intégrité (violence, racisme, harcèlement, dopage, paris truqués, corruption…), la durabilité (urgence climatique), les droits humains (liberté d'expression, signes religieux…), l'identité de genre (LGBTQIA+), le handicap et la formation des jeunes. Ces questions interrogent le rôle de régulateur de l'État dans le paysage national du sport mais aussi européen et mondial. Aujourd'hui, la réponse à certaines de ces questions demanderait une nouvelle régulation nationale, européenne ou/et mondiale (agences mondiale et nationale d'intégrité du sport ? organisme de gouvernance du sport mondial ?) à l'instar du rôle clé joué par la France dans la création, en 1999, de l'agence mondiale antidopage, cogérée et cofinancée par les États et le mouvement sportif international.