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Quel est le rapport des Français à l’Europe ?
Les citoyens français ont un rapport à l'Europe qu'on pourrait qualifier d'ambivalent.
Ambivalent, pourquoi ?
Parce que, d'un côté, une majorité de Français adhèrent à cette construction européenne et il n'y a pas de majorité europhobe qui serait favorable à une sortie de l'Union européenne.Il y a un attachement qui est réel.
D'un autre côté, il est clair aussi qu'une grande majorité de Français nourrissent des formes de scepticisme, de défiance vis-à-vis de cette construction européenne.
Le point important et qui marque une forme de singularité des Français vis-à-vis de la construction européenne, c'est que notre pays figure parmi ceux qui sont les plus critiques vis-à-vis de la construction européenne.
Et par ailleurs, on peut également signaler qu'une fracture sociale structure, organise en quelque sorte, une sorte de clivage, un clivage très significatif dans notre pays à propos de l'Union européenne.Puisque on le sait, les chiffres, les enquêtes d'opinion sont très clairs à ce sujet.
Les Français qui sont les plus défavorables à la construction européenne sont ceux qui appartiennent aux catégories sociales les plus défavorisées.
Et cette ambivalence et cet euroscepticisme fort ont des conséquences évidemment très importantes.
Il est clair que sur certains sujets, par exemple, l'attachement aux valeurs qui sont liées à la construction européenne, par rapport également à l'attachement à la libre circulation.Concernant enfin l'attachement à la monnaie unique, à l'euro, il est clair que ces personnes ambivalentes peuvent se rapprocher des europhiles, de ceux qui sont favorables à la construction européenne.
Et en même temps, ces mêmes ambivalents, ces mêmes personnes, finalement neutres vis-à-vis de la construction européenne, peuvent pencher aussi du côté de ceux qui sont plus eurosceptiques, et notamment sur des sujets sur lesquels ils considèrent que l'Union européenne devrait produire des résultats et qu'en même temps, les résultats manquent aujourd'hui.
On peut penser par exemple à la politique migratoire.
On peut également penser aux questions diplomatiques ou aux questions de défense avec cette idée que l'Union européenne n'est pas suffisamment unie et forte sur la scène internationale.
Quelles sont les priorités de la PFUE ?
Je pense que pour comprendre ce que sont les priorités de la France pour cette présidence française du Conseil de l'Union européenne, il faut essayer de mettre en perspective et en cohérence en réalité, un certain nombre d'éléments.
Je pense que cette PFUE elle doit viser à contribuer, même modestement, à répondre à un certain nombre d'attentes, voire de craintes, de peurs.
Je dis ça parce que ce qui caractérise le contexte dans lequel les Français et les Européens sont plongés aujourd'hui, c'est un contexte d'incertitude.
Incertitude sur le plan économique et social après deux ans de crise pandémique, un sentiment d'incertitude, voire d'insécurité vis-à-vis de la mondialisation, que ce soit sur un plan économique, mais aussi sécuritaire, géopolitique, mais aussi technologique.On le voit avec la question du numérique, par exemple les géants du numérique, des GAFA.
Et puis aussi une incertitude, sur le plan je dirais identitaire qui renvoie à la question du modèle de société dans laquelle on souhaite vivre, entre Européens.
Sur le premier registre, sur ces craintes en matière socioéconomique, avec derrière une peur du déclassement individuel, avec la crainte de perdre son emploi, il y a quelque chose qui relève effectivement d'un effort vraiment important à cet égard.
Un exemple très concret.Tout l'enjeu d'essayer d'aboutir sous présidence française à un accord sur les salaires minimums au niveau européen me semble complètement entrer dans cette configuration-là et dans cet effort-là.
Sur le second registre, on voit qu'il y a tout un débat sur l'importance que revêtent aujourd'hui et la puissance que revêtent les géants du numérique.
Pendant cette présidence française notre pays va s'efforcer de pousser comme priorité législative sur le plan institutionnel, un certain nombre de directives, deux directives qui visent à encadrer l'activité de ces géants du numérique.
Et, sur le troisième registre, je dirais sur l'aspect existentiel et quasiment identitaire du point de vue de l'identité collective des Européens, on voit bien que dans certaines franges de la population, il y a des interrogations très fortes sur les enjeux migratoires, sur la protection des frontières extérieures de l'Union européenne et c'est dans le cadre de cette présidence française. Troisième exemple très concret, notre pays va s'efforcer de pousser une réforme de la gouvernance de l'espace Schengen.Quelle place donner aux citoyens dans les décisions de l’UE ?
La question démocratique est une question fondamentale pour l'avenir de l'Europe.
D'abord parce que nous sommes plongés depuis plus de dix ans dans un contexte de crises multiples.Crise climatique, tensions géopolitiques très fortes entre les Européens et d'autres puissances dans le monde, crise énergétique avec la flambée des prix du gaz aujourd'hui, crise interne avec des défis très importants lancés à l'État de droit par certains État membres de l'Union européenne et puis évidemment, incertitude économique et sociale après deux ans de crise, de crise pandémique.
Ce qu'on voit, c'est que les principales décisions qui ont été prises pour faire face à ces chocs, à ces crises, l'ont été sous la pression des événements, l'ont été sous la pression de l'urgence et je crois que ça a un coût.
Ça a un coût politique parce que ça laisse penser que les principales décisions, les principales avancées prises au niveau européen, ne font pas nécessairement l'objet de débats démocratiques.
Or, je pense qu'il faut répondre à cette question qui, en réalité, est la question de la légitimité politique, des décisions qui sont prises.
On ne peut plus se contenter de continuer à avancer à marche forcée sous la seule pression des événements, sous la seule pression de la nécessité.
Et c'est là où un débat démocratique est important et même essentiel et c'est ce qui, je crois, permet de rendre compte des demandes croissantes en matière de pratiques démocratiques renouvelées, comme c'est le cas pour les formes de démocratie participative, les consultations citoyennes, les conférences citoyennes, par exemple, pour le climat qui ont eu lieu en France, la conférence évidemment sur l'avenir de l'Europe à l'échelle européenne.
Je crois que tous ces exercices de démocratie participative et délibérative, c'est pas tout à fait la même chose, répondent, en fait, ou en tout cas, sont censés répondre à ces attentes.
Donc je crois qu'elles sont très utiles. Elles sont absolument indispensables.
La question, malgré tout, que posent ces modalités nouvelles d'exercice démocratique par les citoyens, directement c'est la question de leur débouché politique.
Est-ce qu'il s'agit de simples exercices de consultation ?
Est-ce qu'on doit prendre en compte stricto sensu les conclusions de ces délibérations pour en faire des décisions ?
Autant de questions qu'il est très difficile de trancher en fait aujourd'hui et qui posent en réalité comme question fondamentale celle de l'articulation entre ces formes de démocratie participative et délibérative d'un côté, et leur place dans la démocratie représentative telle qu'elle existe aujourd'hui.