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Proposition de loi visant à prévenir les ingérences étrangères en France

Temps de lecture  5 minutes

Face à l'intensification des ingérences étrangères (cyberattaques, fausses informations...) dont la France est la cible, la proposition de loi envisage plusieurs mesures en matière de transparence (registre des représentants d'intérêts étrangers) et de renseignement (utilisation des algorithmes, gel des avoirs).

Où en est-on ?

  1. Étape 1 validée

    Dépôt au parlement

    6 février 2024

  2. Étape 2 en cours

    Examen et adoption

    27 mars 2024

    1ère lecture

  3. Étape 3 à venir

    Promulgation

Qu'est-ce que la procédure législative ?

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Le 22 mai 2024, le Sénat doit examiner la proposition de loi. L'Assemblée nationale l'a adoptée en première lecture, avec modifications, le 27 mars 2024.

Cette proposition de loi s'inspire de deux rapports parlementaires récents de la délégation parlementaire au renseignement (DPR) et de la commission d'enquête parlementaire sur les ingérences étrangères, qui ont souligné les fragilités de la France ainsi qu'une certaine naïveté qui a prévalu longtemps dans ce domaine. Les menaces étrangères, qui proviennent principalement de Russie, de Chine, de Turquie, d’Iran, se situent désormais à un niveau élevé dans un contexte de nouvelle "ère froide". Elles sont facilitées par les outils numériques (cyberespace).

Pour les auteurs du texte, le statut de grande puissance de la France "l’expose à des agressions ou tentatives de déstabilisations protéiformes émanant de l’étranger". Les outils qui existent aujourd'hui pour les contrer, bien qu'efficaces, "demeurent parfois insuffisants au regard de l’intensification de la menace que font peser les ingérences étrangères sur l’exercice de la souveraineté nationale". C'est pourquoi, ils proposent de nouveaux dispositifs. Leur texte a été modifié au cours des débats à l'Assemblée nationale.

Création d'un registre des représentants d'intérêts étrangers

Le texte prévoit la mise en place d'un registre numérique recensant les "représentants d'intérêts" agissant pour le compte d'un "mandant étranger" (puissances et entités étrangères, partis ou groupes politiques étrangers) dans le but d'influencer la décision publique, notamment la fabrique de la loi (activités de lobbying), de réaliser des activités de communication ou de collecter de l'argent ou en verser sans contrepartie. 

Ainsi, toute personne, peu importe sa nationalité, qui promeut les intérêts d’une puissance étrangère (hors Union européenne) auprès des pouvoirs publics français ou du grand public, sera soumise à une obligation déclarative. En seront toutefois dispensés le personnel diplomatique et consulaire en poste en France et les fonctionnaires des États étrangers. Les lobbies qui agissent pour un mandant étranger seront également soumis aux obligations déontologiques prévues par la loi "Sapin 2" de 2016.

La gestion de ce nouveau répertoire est confiée à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Il sera public et sera commun à la Haute Autorité, à l'Assemblée nationale et au Sénat. L’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires a été modifiée par amendement pour prévoir l’application du nouveau dispositif au sein des assemblées parlementaires.

La création de ce registre s'inspire de la législation en vigueur aux États-Unis (loi sur l’enregistrement des agents étrangers ou FARA pour Foreign Propagandists Registration Act) et au Royaume-Uni (loi sur la sécurité nationale de 2023 instaurant un registre relatif aux influences étrangères, le Foreign Influence Registration Scheme ou FIRS).

Les personnes qui refuseraient de transmettre à la HATVP des informations (sur leur identité, leurs activités, les personnes approchées...) risqueront trois ans de prison et 45 000 euros d’amende. Les peines prévues pour les personnes morales sont plus lourdes : 225 000 euros d’amende, interdiction de percevoir une aide publique...

Un décret d'application est prévu afin que ce répertoire entre en application au plus tard fin 2024.

Sur amendement, les parlementaires ont en outre imposé aux laboratoires d'idées (think tanks) de déclarer les dons et versements étrangers auprès de la HATVP.

Rapport au Parlement sur les ingérences étrangères

La proposition de loi prévoit la remise par le gouvernement, avant le 1er juillet 2025 puis tous les deux ans, d’un rapport annuel au Parlement sur l’état des menaces qui pèsent sur la sécurité nationale, et notamment des menaces résultant d’ingérences étrangères. 

Ce rapport pourra faire l’objet d’un débat au Parlement. 

Technique de l’algorithme et gel des avoirs

La proposition de loi autorise, à titre expérimental pendant quatre ans, les services de renseignement à utiliser la technique dite de l’algorithme pour détecter des connexions susceptibles de révéler "toute forme d’ingérence ou de tentative d’ingérence étrangère". L'usage de cette technique est aujourd'hui uniquement permis pour détecter des menaces terroristes, et ce à titre pérenne depuis la loi du 30 juillet 2021 relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement

Le gouvernement devra remettre un rapport intermédiaire évaluant cette extension de la technique algorithmique.

Par ailleurs, la procédure de gel des avoirs financiers, autorisée en matière de terrorisme, est étendue aux personnes se livrant à des actes d’ingérence. L'acte d'ingérence est défini dans ce cadre dans le code monétaire et financier comme "des agissement commis directement ou indirectement à la demande ou pour le compte d’une puissance étrangère et ayant pour objet ou pour effet, par tout moyen, y compris la communication d’informations fausses ou inexactes, de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation, au fonctionnement ou à l’intégrité de ses infrastructures essentielles ou au fonctionnement régulier de ses institutions démocratiques".

Le Sénat doit examiner la proposition de loi, en séance publique, le 22 mai 2024.

Où en est-on ?

  1. Étape 1 validée

    Dépôt au parlement

    6 février 2024

  2. Étape 2 en cours

    Examen et adoption

    27 mars 2024

    1ère lecture

  3. Étape 3 à venir

    Promulgation

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