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Accès aux soins : des refus pour les bénéficiaires de certaines aides d'État

Temps de lecture  3 minutes

Par : La Rédaction

Le principe de non-discrimination figure parmi les premiers principes du code de déontologie médicale. Or, certains patients semblent subir des discriminations au cours de leurs parcours de soins en raison de leur origine, de leur handicap… ou parce qu’ils perçoivent une aide sociale. Quelle est l’ampleur de ce phénomène ?

Une étude publiée le 12 mai 2023 par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) analyse "les refus de soins opposés aux bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire et de l’aide médicale de l’État". Elle s’appuie sur un testing portant sur une première prise de rendez-vous par téléphone auprès de généralistes, d’ophtalmologues et de pédiatres, hors motif d’urgence. Elle compare les taux d’obtention de rendez-vous entre des patients "de référence" et des patients percevant la complémentaire santé solidaire (CSS) ou l’aide médicale de l’État (AME).

Le refus de soins discriminatoire

Il se produit lorsqu'un professionnel de santé refuse de recevoir ou traite moins bien un patient parce qu’il présente l’un des critères énoncés à l’article 225-1 du code pénal ou qu’il touche une prestation sociale. Des patients se voient refuser explicitement une prise en charge car ils bénéficient d’une aide. Un motif légitime de refus (pas de disponibilité…) peut aussi masquer une discrimination s’il est opposé plus fréquemment à une population ciblée.

Une discrimination envers les bénéficiaires de l’AME

Tous les patients ont du mal à accéder aux soins :

  • seuls 52,2% des patients de référence (qui n’annoncent au téléphone le bénéfice d’aucune aide sociale) obtiennent un rendez-vous avec l’un des praticiens. Les professionnels qui refusent déclarent le plus souvent ne pas prendre de nouveaux patients ou ne pas pouvoir gérer la pathologie décrite du fait de leur spécialisation. Quatre appels sont nécessaires en moyenne pour entrer en contact avec un cabinet médical. Les personnes qui obtiennent un rendez-vous se voient proposer un délai moyen de huit jours chez un généraliste mais supérieur à 27 jours pour un pédiatre et à 58 jours pour un ophtalmologue ;
  • les bénéficiaires de la CSS ont quasiment autant de chances d’obtenir un rendez-vous que les patients de référence. 1,5% de leurs appels conduisent cependant à un refus discriminatoire explicite ;
  • les bénéficiaires de l’AME doivent appeler 1,3 fois plus de médecins que les patients de référence pour avoir un rendez-vous. Ils ont 25% de chances en moins d’en obtenir un chez un généraliste, 28% en moins chez un ophtalmologue et 16% en moins chez un pédiatre.

38% des médecins différencient leur pratique selon le statut des patients

6,5% des appels des bénéficiaires de l’AME se soldent par un refus explicitement discriminatoire. Ces refus sont plus courants chez les ophtalmologues et les pédiatres ; les généralistes recourent davantage à des motifs légitimes.

La réticence à accepter les bénéficiaires de l’AME peut s’expliquer par la crainte :

  • d’une prise en charge plus complexe (patients en moins bonne santé, maîtrisant peu le français…) ;
  • de démarches administratives plus lourdes, ces patients n’ayant pas la carte vitale. La création de la CSS en 2019 en remplacement de deux autres prestations a simplifié cependant la gestion par les professionnels de santé et contribué à réduire les refus de soins opposés aux bénéficiaires.