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© Stephane Ferrer Yulianti / Hans Lucas /AFP

Les politiques de l'immigration depuis 1974 dans les discours publics

Temps de lecture  9 minutes

Par : La Rédaction

Le projet de loi sur l'immigration et l'intégration a été adopté par le Parlement le 19 décembre 2023. L'occasion pour Vie-publique.fr de revenir sur les politiques de l'immigration avec une sélection de discours publics prononcés depuis les années 1970.

À partir de 1974 : mise en place d'une politique de contrôle des flux migratoires

En juillet 1974, face à la hausse du chômage et à la crise économique, sous la présidence de Valery Giscard d'Estaing, le gouvernement en place décide l'arrêt de l'immigration de main d'œuvre. Décision suivie par la reconnaissance officielle du regroupement familial en 1976 et l'aide au retour dans le pays d'origine en 1977.

Cette politique se prolonge avec la loi Bonnet votée en 1980, rendant plus strictes les conditions d'entrée sur le territoire et permettant l'expulsion d'étrangers en cas de troubles à l'ordre public.

Les années Mitterrand : 1981-1995

Avec l'élection de François Mitterrand à la présidence de la République, une série de mesures immédiates sont prises pour faciliter les droits des immigrés et la suspension de toute expulsion. Les dispositions de la loi Bonnet sont abrogées en octobre 1981 et le dispositif d'aide au retour supprimé en novembre 1981.

Mais l'émergence du Front National en 1983 et la crise économique persistante influencent les discours politiques. La priorité est double : maitrise des flux migratoires tout en facilitant l'intégration. Le 3 décembre 1983, une délégation de la "Marche pour l'égalité et contre le racisme", dite "marche des Beurs" partie de Marseille pour rejoindre Paris, est reçue à l'Élysée par le président de la République.

La loi du 17 juillet 1984 sur le titre unique de séjour et de travail reconnait le caractère durable de l'installation en France de la population immigrée et dissocie droit au séjour et occupation d'un emploi.

La cohabitation de 1986 à 1988 du gouvernement Chirac

La loi du 9 septembre 1986, dite loi Pasqua, rend aux préfets le droit de prononcer la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière et rétablit le régime de l'expulsion tel qu'il existait antérieurement à la loi de 1981.
 

Après la réélection de François Mitterrand en 1988 et sous le gouvernement de Michel Rocard, la loi Joxe du 2 août 1989 crée un recours suspensif contre la reconduite à la frontière.

La cohabitation de 1993 à 1995 du gouvernement Balladur

Avec la deuxième cohabitation, le code de la nationalité est réformé (loi du 22 juillet 1993) et de nouvelles "loi Pasqua" sont promulguées, celle du 10 août 1993 facilitant les contrôles d’identité et celle du 24 août 1993.
 

Les années Chirac : 1995-2007

En 1996, la mobilisation des sans-papiers domine l’actualité avec l'occupation de l'Église Saint-Ambroise et de Saint-Bernard à Paris, pour protester contre les expulsions.

En février 1997, la Ligue des droits de l’homme présente un "appel contre la loi Debré", demandant le retrait du texte sur l’immigration, un moratoire sur les expulsions et une régularisation des sans-papiers. La loi Debré promulguée le 24 avril 1997 renforce le dispositif d'éloignement des étrangers en situation irrégulière et la rétention administrative de ces mêmes étrangers. 

La cohabitation de 1997 à 2002 du gouvernement Jospin

Le gouvernement Jospin installé le 2 juin 1997, annonce une régularisation partielle des sans-papiers. Une nouvelle loi est voté le 11 mai 1998 (loi Chevènement).
 

Après la réélection de Jacques Chirac en 2002, la loi de novembre 2003  dite "loi Sarkozy I" instaure notamment un contrôle accru des demandes de visa et crée un fichier d'empreintes digitales des demandeurs de visa.

Le 8 juillet 2004, Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, annonce officiellement la création de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration.

  • Déclaration de M. Jean-Pierre Raffarin, le 8 juillet 2004. "Ce lieu doit permettre aux immigrés et à leurs enfants de connaître cette histoire pour que les "mémoires d'immigrés" soient des mémoires partagées. C'est ainsi que l'on consolidera l'identité d'enfants parfois sans repères qui s'interrogent sur leurs liens avec la France."

Dès 2005, le discours public en matière d'immigration repose sur le passage d'une immigration dite "subie", à une immigration "choisie" dirigée vers les secteurs déficitaires en main-d’œuvre. 

Dans son discours du 9 juin 2005, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur s’exprime : "À tout subir, à ne rien choisir, nous méconnaissons à la fois nos intérêts économiques et nos convictions humanitaires. Je veux passer d'une immigration subie à une immigration choisie." Il demande au gouvernement et au Parlement de fixer annuellement, "catégorie par catégorie", le nombre de personnes admises à s’installer en France.

C'est dans ce contexte que la loi relative à l'immigration et à l'intégration dite "loi Sarkozy II" est promulguée le 24 juillet 2006. Elle rend notamment le Contrat d'accueil et d'intégration (CAI) obligatoire pour tout nouvel arrivant.

À partir de 2006 : développement de la notion d'immigration choisie, renforcement de la politique dite d'intégration

Les années Sarkozy : 2007-2012

Une fois élu président de la République, Nicolas Sarkozy marque clairement l'objectif de la nouvelle politique par une lettre de mission adressée à M. Brice Hortefeux le 9 juillet 2007, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement : accroitre la part de l’immigration économique jusqu’à 50%, par rapport aux autres motifs d'immigration. 

La loi du 20 novembre 2007 durcit les conditions pour le regroupement familial et autorise dans certaines conditions, le recours aux tests ADN.

La loi Besson promulgué le 16 juin 2011 poursuit l'orientation vers une immigration "choisie".

Les années Hollande : 2012-2017

“Notre système est à bout de souffle”, évoque le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, au sujet de l'asile en France. Il ouvre le 15 juillet 2013, une concertation avec les élus et les représentants associatifs sur la réforme du droit d’asile.

À partir de 2015, un afflux massif et rapide de migrants originaires de Syrie, aux frontières de l'Europe est qualifié de "crise migratoire" et bouleverse profondément la politique d’asile en France. 

La loi relative au droit d'asile est promulguée le 29 juillet 2015.

La loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, crée un nouveau Contrat d'Intégration Républicaine (CIR), qui remplace le CAI.

Les années Macron : depuis 2017

Le député Aurélien Taché remet un rapport en février 2018 sur la politique d'intégration des étrangers arrivant en France. Il appelle à une approche globale de tous les leviers de l'intégration (langue, emploi, logement, droits sociaux). Le gouvernement " reprendra à son compte les grands axes de vos propositions", annonce le Premier ministre Edouard Philippe lors de la remise de ce rapport. 

La loi asile et immigration dite "loi Colomb" est promulguée le 10 septembre 2018.

En septembre 2022, Emmanuel Macron, s’exprimant lors d’une réunion de rentrée avec les préfets, présente les objectifs de la future réforme sur l’asile et l’immigration